Namur – Jean Hoellenbeck, le gardien-chef de la prison de Namur s’est douté que quelque chose se tramait bien avant que son prisonnier ne s’enfuit mais il n’avait pas compris de suite les raisons qui faisaient que le matriculé BL45312879 reçoive autant de petits paquets depuis ces derniers mois, tous remplis de choses anodines en apparence.

Au quartier ‘Depardieu’, comme aiment à l’appeler les gardiens cette aile de la prison où sont logés les détenus francophones, le matricule BL45312879 était considéré comme un prisonnier modèle. L’homme d’une trentaine d’années, très bricoleur, s’était attiré les bonnes grâces de ses codétenus et des matons et avait été surnommé McGyver, en hommage à ses talents à réparer une machine à café avec une tong ou encore de capter les chaines du câble sans abonnement en piratant l’émission des habitations voisines. Depuis quelques mois, il recevait de l’extérieur des petites boites, remplis de ficelles, de morceaux de plastiques, de fils électriques et de divers objets qui, bien que vérifiées et revérifiés par les gardiens lors de la réception, ne les avaient aucunement alertés. Rien de tout ce fatras ne pouvait être dangereux et la prison de Namur n’est pas connue pour héberger des criminels dangereux mais plutôt des délinquants pas bien méchants, plus habiles à truquer des chèques volés que de jouer du couteau ou du pistolet pour effectuer leurs larcins. Aussi, quand le matricule BL45312879 a demandé à Jean Hoellenbeck s’il pouvait construire une antenne de plus grande largeur dans la cour de la prison, ce dernier n’y a pas vu le mal. Si c’est pour recevoir Canal+ en clair ou be In Sports et regarder gratuitement les matches de foot de la Belgique pendant les temps de service, quelles raisons y aurait-il eu de s’en priver. Pendant deux semaines, toute la prison est venue voir ce drôle d’assemblage qui prenait forme au bas des fenêtres des cellules du quartier ‘Depardieu’. Tout le monde a cru que les petites hélices sur le dessus serviraient à refroidir le montage mais un matin, alors que personne ne s’y attendait, le matricule BL45312879 s’est installé au centre de son étrange construction et, dans bruit de moulins à café lancés à pleine vitesse, s’est rapidement élevé au-dessus des murs de la prison et a disparu. L’alerte a été donnée quelques minutes plus tard mais la police a mis plusieurs heures avant de réaliser que les gardiens de la prison de Namur disaient la vérité et qu’ils n’avaient pas, ce matin-là, trop avalé de Blanche de Namur, la bière de la ville.

Personne n’a encore remis la main sur le matricule BL45312879, pas plus que quiconque ne peut dire s’il est parti en direction de la frontière française, allemande ou luxembourgeoise. La police a demandé l’aide des forces aériennes belges mais ceux-ci ont refusé de faire décoller les F16, certains que cet appel était une blague d’amuseurs français. L’autonomie de l’appareil n’est pas connue mais avec seulement quelques piles rondes d’un volt cinq, Jean Hoellenbeck est persuadé que son prisonnier n’a pas pu aller trop loin. La semaine dernière, il a reçu par la poste une carte d’abonnement pirate à beIn Sports.